Pourquoi vouloir le vrai ?
On aurait généralement propension à affirmer que discourir sur la teneur d’une démarche ou d’un fait que l’on estime « vrai » puisse paraître oiseux : tout un chacun pense savoir ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas, dans le domaine d’activité et de pensée qui lui est propre, dès lors que je m’appréhende en tant qu’énonciateur d’un discours que je ne conçois guère autrement qu’en tant que cristallisation de ma raison à travers ma capacité à dire le « vrai ». C’est là faire transparaître que la vérité est une catégorie commune, immédiatement présente en toute parole humaine, à tel point qu’il peut s’avérer malaisé de voir de prime abord en quoi celle-ci peut constituer le caractère existentiel définitoire de notre trajectoire tant elle nous apparaît tel un truisme, une évidence qui s’impose à nous dans l’exercice circonstancié de notre entendement. Dès lors, comment expliquer alors que celui-ci se définisse justement par la mise en forme achevée de cette faculté même qui, en tant qu’hommes, non seulement nous amène à vouloir connaître le monde, mais aussi à le régir au sens où nous ne saurions demeurer circonscrits à une simple immanence réductrice de notre être en tant que sujets doués d’intellection, et partant, d’une propension à répondre à ce que nous sommes ? De quelle manière nous est-il loisible d’envisager ce à quoi, et ce à cause de quoi nous aspirons si cette inclination semble déjà se définir intrinsèquement dans sa formulation même ? Si nous ne saurions rester indifférents face à la présentation d’une connaissance dont la seule caractéristique authentique réside dans un but précis dont nous sommes les acteurs privilégiés, si l’accession à celle-ci nous semble d’ores et déjà acquise par la simple opération de notre jugement que nous jugeons conforme à l’état de chose auquel il renvoie, pourquoi ce qui est « vrai », donc, ici appréhendé en tant qu’idée saisie par une mise en lumière qui la rend manifeste,