Et au juste, on fait comment pour oublier quelqu’un qui n’existe même pas? Pour oublier quelqu’un qu’on a imaginé, qu’on a créé dans notre propre petite tête et qui a fini en esquisse sur des feuilles, écrit en encre noir, peint en couleurs ? Lorsque c’est nous-mêmes qui l’avons inventé, qui lui avons donné ses qualités, qui avons imaginé ses yeux et ses lèvres, qui lui avons donné un prénom, une vie, qui avons écrit son histoire… On fait comment pour arracher de nos pensées quelqu’un qui fait partie de nous, qui nous possède? On fait comment pour oublier ça qui n’est en fait que fruit d’une imagination indomptable? On fait comment pour effacer des souvenirs d’instants jamais vécus ? Pour oublier ce personnage, ces mots enfermés dans un roman, un roman que j’ai écris moi-même, je fais comment pour oublier? Pour ne pas m’emballer, ne pas me laisser emporter par lui…? Je l’ai imaginé trop séduisant… le protagoniste du roman, trop parfait, trop beau… Tellement que j’en suis tombée amoureuse. Amoureuse de quelqu’un qui n’existe pas. Merde. Je fais comment pour oublier quelqu’un qui n’existe même pas ? Quelqu’un qui apparaît dans chacun de mes rêves. Chacun d’eux. C’est comme si je ne vivais plus. Enfin, je vie, mais dans mes rêves. C’est étrange cette impression de l’avoir déjà touché, déjà vu, déjà entendu. Mais de savoir que ce n’est que dans ma tête, tout ça. La masculinité de son visage, la douceur de ses lèvres, la virilité de son touché, le profond dans ses yeux, la chaleur de son corps, tout ça n’est que dans ma tête. Ça me rend malade. Il n’existe pas. Simplement. Il n’existe pas, merde! Et je ne suis même pas capable de l’oublier. Depuis ce dernier maudit roman, je ne suis même plus capable d’écrire, pas même une fin. Seulement, je n’en suis plus capable.
Chapitre I
Un réveil coutumier précédé d’une nuit sans rêve. Pas de soleil dehors, pas de ciel bleu : que des nuages gris qui prennent égoïstement toute la place. Le parfum des