Proust la mémoire et le temps
Si cette partie de l’œuvre de Genette constitue désormais un passage obligé pour quiconque entreprend des études littéraires, les quelques articles qui la précèdent souffrent un peu de cette notoriété. Pourtant, l’acuité du regard du critique s’y exerce déjà de façon magistrale. L’article Métonymie chez Proust, qui s’applique à démontrer le fonctionnement particulier de ce trope dans le chef-d’œuvre du romancier français, mérite qu’un lecteur qui veut s’aventurer dans La recherche s’y intéresse avant d’entreprendre son voyage.
En dépassant le sens premier de la figure de style qu’est la métonymie, figure qui consiste à déplacer le sens d’un mot vers un autre, Genette parvient à démontrer que chez Proust la métonymie recèle une valeur narrative, que la subjectivité du narrateur entraine une contamination de son récit par le prisme de sa perception. Les descriptions proustiennes obtiennent ainsi une valeur particulière, mouvante, qui fait subir à l’objet décrit une transformation subjective qui sera influencée par les humeurs, les lieux ou l’ambiance qui affectent le narrateur. Ainsi, un même objet, un même lieu, une même personne pourront être décrits différemment en divers endroits dans le texte.
Un des passages qui nous apparait les plus marqués par cette contamination de sens se trouve dans la première partie d’À l’ombre des jeunes filles en fleurs.