Ravel, Viñes, les années de formation
Nous venons au monde avec un passé chargé d’Histoire et nous sommes façonnés de façon inéluctable par notre atavisme génétique et culturel. Marcel Proust illustre ce constat en peu de mots : « Nous tenons de notre famille aussi bien les idées dont nous vivons que la maladie dont nous mourrons. » Si la formule est lapidaire, elle a le mérite de poser des questions fondamentales : Qui sommes nous ? D’où venons-nous ? Lorsqu’en cette année 1875, Maurice Ravel et Ricardo Viñes voient le jour quel est le patrimoine de chacun ? Dans la mesure des connaissances actuelles, que pouvons-nous dire de leur père, de leur mère, des évènements qui entourent leur petite enfance, du milieu dans lequel ils vont évoluer ? ***
Le grand-père de Maurice Ravel, Aimé ou Ami Ravel né à Collonges–sous–Salève en 1800, vint s’établir comme boulanger à Versoix. Il acquiert la nationalité suisse en 1834. De son mariage avec une jeune fille du pays, Caroline Grosfort, il eut cinq enfants : Pierre-Joseph, Marie, Alexandrine, Louise et Edouard.1 L’aîné, Pierre-Joseph, (1832-1908), futur père de Maurice, semble s’intéresser à divers domaines de la connaissance. Jeune adolescent, il est attiré par la musique et en commence l’apprentissage.2 À la fin de ses études d’ingénieur, en 1868, on le retrouve à Paris. Très cultivé, très éclectique quant à ses centres d’intérêt, il appartient à cette sorte de scientifique dont la curiosité se porte essentiellement sur la recherche, et non sur son profit. Quelques revues techniques parlent de ses découvertes, il est considéré comme l’un des premiers à avoir réalisé une automobile au sens moderne du terme.3 Ses