Robert wilson: la réinvention du temps
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Le temps au théâtre. Elément dramatique ou donnée secondaire pour certains, problématique fondamentale, même obsessionnelle pour d’autres, la question du temps est toujours là, indissociable de l’acte créatif. Qu’est-ce que le temps théâtral ? Comment partir de la durée réelle du spectacle, pour imposer un autre temps, celui de l’histoire que l’on choisit de raconter, montrer ? Parmi les créateurs qui ont interrogé le temps dans leur travail : Robert Wilson, et qui dit d’ailleurs : « Dans mes premières pièces, je me préoccupais tout particulièrement de cette idée d’une répétition éternelle. J’ai fait des pièces qui duraient vingt-quatre heures et même une qui se poursuivait pendant sept jours d’affilée. Je me disais qu’il pourrait exister un théâtre où une pièce serait jouée en continu […] Il n’y aurait pas de début, de milieu et de fin comme dans Shakespeare, simplement une suite ininterrompue. » [1]En effet, Wilson, « figure emblématique du théâtre expérimental »[2], s’est toujours amusé avec le temps. Une question s’impose alors : existe-t-il des limites temporelles à l’acte théâtral ? Et s’il y en a, est-il possible de les transgresser sans brusquer celui qui regarde ? Est-ce que diluer, accélérer, répéter, reprendre ou figer, comme le fait Wilson dans son travail, pourrait être défini comme une manipulation du temps théâtral, qui ferait abstraction du temps de vie, du rythme du spectateur, ou au contraire qui s’en approcherait en le détournant ?
Le temps théâtral n’est pas le temps réel ; plus elliptique ou extensible à souhait, il n’est pas celui de la représentation. Quand il y a travail sur la lenteur comme d ans le Nô ou dans le Butoh, le temps est distendu, dilué parce qu’il ne fait que rappeler à l’homme sa relation à l’infini ; point perdu dans le cosmos. Le geste se répète alors à l’infini ou se distant pour dire l’infini de l’homme. Peter Brook, qui s’est beaucoup intéressé aux particularités temporelles du théâtre oriental, notamment