En France, la naissance du romantisme coïncide avec les guerres napoléoniennes (1799-1815). Les poèmes ossianiques de Macpherson, qu'apprécie particulièrement Bonaparte, livrent leurs thèmes aux peintres transfuges du néoclassicisme comme Girodet-Trioson, François Gérard et Antoine Gros, qui s'inspirent également des événements contemporains. Si Gros, dans une série de tableaux à la gloire de Napoléon, redonne à la couleur sa prééminence à travers la théâtralisation des champs de bataille, c'est avec Théodore Géricault que la vision romantique de la guerre, de la mort et de la folie prend les couleurs de la réalité la plus atroce (Cuirassier blessé quittant le champ de bataille, 1814, Musée du Louvre, Paris). Le Radeau de la Méduse (1819, Musée du Louvre) dépeint de façon paroxystique la souffrance humaine et l'inexorabilité de la destinée, thème qui trouve écho chez le peintre Eugène Delacroix, avec les Massacres de Scio (Musée du Louvre), tableau réalisé en 1824, l'année même de la mort de Géricault. Trois ans plus tard, le Salon de 1827 marque l'apothéose du romantisme en même temps qu'il porte à son comble la polémique à propos de l'esthétisme. Au raffinement exacerbé d'un François Gérard s'opposent la violence et l'érotisme de la Mort de Sardanapale (1827, Musée du Louvre) de Delacroix. Si cet artiste emprunte souvent ses sujets à la littérature, il s'attache à transcender ce qu'ils contiennent de littéraire ou de didactique en créant, par l'usage de la couleur, un effet d'énergie et d'émotion pures comparable à celui que procure la musique. Ainsi, rejetant la prépondérance accordée par les néoclassiques à la forme et aux contours, Delacroix s'accorde-t-il, avec la Mort de Sardanapale, inspirée d'une œuvre de lord Byron, une totale et entière liberté dans le traitement de la couleur ou la représentation des corps. Si la violence de la scène et son caractère mortifère — face à ses ennemis, le roi Sardanapale fait exécuter ses favorites puis se suicide —