« Il y a mille marques qui font juger qu'il y a à tout moment une infinité de perceptions en nous, mais sans aperception et sans réflexion, c'est-à-dire des changements dans l'âme même, dont nous ne nous apercevons pas, parce que les impressions sont, ou trop petites et en trop grand nombre, ou trop unies, en sorte qu'elles n'ont rien d'assez distinguant à part, mais jointes à d'autres, elles ne laissent pas de faire leur effet et de se sentir, au moins confusément dans l'assemblage. » Leibniz Le plus bas niveau de la conscience, accessible à l’homme comme aux insectes, est le traitement de l’information. Lorsque l’homme en est momentanément incapable, on peut dire qu’il est dans un état d’inconscience. Or, Leibniz propose ici une thèse originale, selon laquelle, même si nous sommes conscients, de nombreux phénomènes nous échappent : il existerait des perceptions sans conscience. Le terme « marques » signifie ici « preuves ». Selon Leibniz, l’existence de petites perceptions est un fait que la vie courante démontre sans cesse, bien qu’il ne fournisse pas d’illustrations. Ce qui caractérise ces petites perceptions est le fait qu’elle se produise inconsciemment sans que le sujet s’en rende compte. Puisqu’il n’en est pas conscient, le sujet ne peut donc pas les « réfléchir ». Ici est évoqué un autre niveau de la conscience, à savoir la réflexivité, qui permet à l’homme de se représenter ce dont il a conscience, de le penser, de prendre du recul vis-à-vis de lui. Selon Leibniz il existe donc un seuil de perception : si ce seuil n’est pas atteint, les perceptions restent inaccessibles au sujet. Par exemple, le bruit d’une seule vague n’est pas suffisant pour former le bruit de la mer, qui est composé d’une infinité de vagues. Le terme « parce que » introduit une explication. Leibniz cherche à découvrir les causes de ce phénomène. Il peut s’agir d’abord d’impressions « trop petites », c'est-à-dire quantitativement trop fines pour le seuil de perception humain. Il