Une citoyenneté européenne est-elle possible ?
Notre imaginaire politique européen est hanté par la figure de l’État fédéral. Bien sûr, depuis l’échec du projet de Constitution, nul ne se risque encore à user du vocable lui-même. Mais, au-delà des précautions sémantiques, la plupart des pistes envisagées en vue de « démocratiser l’Europe » – qu’il s’agisse d’élire un « gouvernement de l’Europe » en faisant de la Commission l’incarnation d’une majorité politique, de renforcer les partis politiques européens, de « politiser » les modes de décision européens par un plus grand recours au principe d’alternance fondé sur le clivage droite/gauche… [1] – en reviennent régulièrement à une forme de reconduction, à une échelle élargie, des mécanismes délibératifs et représentatifs forgés dans le cadre stato-national.
Ce volontarisme a pourtant montré ses limites. Du point de vue de l’implication citoyenne, le « mimétisme institutionnel » – nom barbare donné aux multiples tentatives faites pour transposer, au niveau européen, les formes de la démocratie nationale – a donné des résultats mitigés. Les réformes engagées pour « démocratiser » l’Europe – depuis l’élection, en 1979, du Parlement européen au suffrage universel jusqu’à son accession récente au rang de quasi-législateur – n’ont guère contribué à l’émergence d’une vie politique européenne.
Le taux de participation aux élections européennes, qui s’articulent largement sur des clivages nationaux, est passé de 63% en 1979 à 45,5% en 2004. Quant aux partis politiques au niveau européen, dont l’existence est souvent méconnue des adhérents nationaux, ils n’ont pas dépassé le stade d’une simple coopération