Question 1 (8 points)
« Zazie est hors de l’humanité (…) : elle n’est en rien une « petite fille », sa jeunesse est plutôt une forme d’abstraction qui lui permet de juger tout langage ».
Commentez cette analyse du personnage de Zazie par le critique Roland Barthes, en vous appuyant à la fois sur le roman de Queneau et sur l’adaptation qu’en fait Louis Malle à l’écran. Zazie est le personnage principal de l’œuvre éponyme, Zazie dans le métro. Roman expérimental de Raymond Queneau, adapté au cinéma par Louis Malle, il s'agit à l'origine d'un exercice de néo-français, tourné vers le langage qu'affectionne et théorise Queneau. Sur papier comme à l'écran, la langue, dans Zazie dans le métro, ne donne pas forme au fond. C'est le fond, l'histoire, qui motive, révèle la langue. Zazie dans le métro, ce sont les péripéties de la langue française à travers les mots de personnages bavards... et que Zazie fait parler. Plus qu'un rôle classique, caractérisé par une psychologie, un physique définis, Zazie est un catalyseur. La fillette n'est jamais décrite dans le livre. Louis Malle, s'il ne peut rendre à l'écran un personnage sans visage, fait le choix d'une actrice plus jeune que la Zazie d'origine. Asexuée, habillée à l'image d'une fillette d’Épinal, elle renvoie à un archétype d'enfant avant de signifier un personnage à part entière. Dans le livre comme à l'écran, Zazie ne connaît pour ainsi dire aucune intériorisation et n'a pour tout passé connu qu'un fait divers douteux. C'est son statut d'enfant et la question qu'à lui seul, il pose aux adultes, qui constituent l'utilité narrative de la fillette. La question de la nature des adultes, en effet, devient latente sitôt leur gent confrontée à la seule figure enfantine du livre. Nous reviendrons plus tard sur la couleur que donnent Queneau et Malle au regard sur cette même gent. Au préalable, et convenant que Zazie, en l'absence de réalité humaine pour le public, est bien une idée de la jeunesse plutôt qu'une