L'illusion comique
Commentaire composé Corneille, L’illusion comique (acte II, scène 2, v. 221-256) par Henri Guinard
Dans son « Épître préliminaire », Corneille écrivait : « Voici un étrange monstre [...]; le premier acte n’est qu’un prologue, les trois suivants sont une comédie imparfaite, le dernier est une tragédie, et tout cela cousu ensemble fait une comédie. » Il le « fait » d’autant mieux, ajouterons-nous, que la dernière scène, un happy end, consiste en un éloge du théâtre (V, 5). Le vieux Pridamant consulte un magicien, Alcandre, sur le sort de son fils Clindor disparu depuis longtemps (acte I). D’un coup de baguette magique Alcandre met en présence du père et des spectateurs Clindor devenu valet d’un capitaine fanfaron.
MATAMORE, CLINDOR CLINDOR Quoi ! monsieur, vous rêvez ! et cette âme hautaine, Après tant de beaux faits, semble être encore en peine ! N’êtes-vous point lassé d’abattre des guerriers ? Et vous faut-il encor quelques nouveaux lauriers ? MATAMORE Il est vrai que je rêve, et ne saurais résoudre Lequel je dois des deux le premier mettre en poudre, Du grand sophi de Perse, ou bien du grand mogor. CLINDOR Eh ! de grâce, monsieur, laissez-les vivre encor. Qu’ajouterait leur perte à votre renommée ? D’ailleurs, quand auriez-vous rassemblé votre armée ? 230 MATAMOREMon armée ? Ah, poltron ! ah, traître ! pour leur mort Tu crois donc que ce bras ne soit pas assez fort ? Le seul bruit de mon nom renverse les murailles, Défait les escadrons, et gagne les batailles. Mon courage invaincu contre les empereurs235 N’arme que la moitié de ses moindres fureurs ; D’un seul commandement que je fais aux trois Parques, Je dépeuple l’État des plus heureux monarques ; La foudre est mon canon, les Destins mes soldats : Je couche d’un revers mille ennemis à bas.240 D’un souffle je réduis leurs projets en fumée ; Et tu m’oses parler cependant d’une armée ! Tu n’auras plus l’honneur de vois un secons Mars ; Je vais t’assassiner d’un seul