Cette scène est une scène de monologue (du grec « monos », seul et « logos », parole, discours) : Harpagon est seul en scène et se parle à lui-même, mais, ce qui serait anormal dans la vie courante est admis au théâtre. Le discours théâtral relève de la « double énonciation » : l’énoncé (mais non l'énonciateur), s’adresse à la fois à un autre personnage et au public. En l’absence d’interlocuteur, l’énoncé s’adresse donc uniquement au public. I/2) Le monologue théâtral présente les mêmes inconvénients que les scènes d’exposition : leur caractère artificiel, leur manque de vraisemblance, mais ils ont l’avantage de montrer l’état d’esprit des personnages, leurs sentiments profonds. Dans le monologue théâtral, le personnage n’ayant pas d’interlocuteur n’a rien à cacher ; on est pour ainsi dire « dans sa tête ».. I/3) Le monologue est beaucoup plus fréquent dans les tragédies et les tragi-comédies que dans les comédies. Les monologues interviennent aux moments cruciaux, quand la tension dramatique est à son comble, lorsqu’un personnage est amené à délibérer, à réfléchir avant de prendre une décision grave. C'est d'ailleurs ici le cas, dans la dernière partie de la tirade : Harpagon est amené à prendre une décision : faire donner la question à tout le monde puis faire pendre tout le monde, y compris lui-même s'il ne retrouve pas son argent, mais on ne peut pas dire que cette "décision" soit le fruit d'un délibération ! Le monologue est donc la marque d’une tension dramatique. On peut en conclure que L’Avare n’est pas, à proprement parler une « comédie », même si la pièce se termine bien : Harpagon retrouve "sa chère cassette" et les deux couples d’amoureux, Cléante et Mariane d’une part, Elise et Valère, d’autre part, se marient, mais le fond de la pièce est très noir ; L'Avare est la plus noire des comédies de Molière avec Le Tartuffe, la rivalité entre Harpagon et son fils, en particulier, n'a rien d'amusant et Harpagon est souvent plus malveillant, voire