"l'insociable sociabilité de l'homme"
On décrit fréquemment l’Homme comme un « animal sociable », enclin à rechercher l’association avec ses semblables ; on aurait ainsi tendance à inférer qu’il est dans sa nature de fuir l’isolement pour se tourner vers la vie en société. Pourtant, dans cette quatrième proposition de « Idée d’une histoire universelle au point de vue cosmopolitique », Kant affirme la présence, chez l’être humain, d’une « insociable sociabilité », en d’autres termes d’une inclination à la fois à vivre en société et à s’isoler de manière à pouvoir tout diriger en son sens. De plus, Kant soutient la thèse, à première vue assez paradoxale, que c’est justement cette même « insociable sociabilité » qui permet de fonder une société régie par des lois communes.
Pourtant, si l’homme est en partie naturellement enclin à s’isoler, la vie permanente en société ne le déshumanise-t-elle pas en rendant ce « penchant » impossible? De même, si l’homme est en permanence tiraillé entre ces deux inclinations, la stabilité de la société n’est elle pas précaire ? S’il existe bien chez l’être humain une « insociable sociabilité », la société, qui nécessite que les Hommes fonctionnent ensemble et en cela parfois au détriment de leur intérêt personnel est remise en cause dans son principe même : si chacun agit par intérêt, il n’est pas de société possible.
Dans ce texte, Kant, dans une première partie (lignes 1 à 4) Kant pose la structure de sa thèse selon laquelle c’est de l’antagonisme même de ses dispositions que l’homme développe ces dernières. C’est pourquoi dans une deuxième partie (lignes 5 à 11), il expose les dispositions contradictoires de l’être humain et montre comment cet antagonisme contraint l’homme, finalement, à se développer au-delà du seul intérêt égoïste immédiat. A partir de là l’auteur peut alors montrer, dans la continuité du propos précédent, comment l’insociabilité de l’Homme lui permet