M'est-il permis de penser à haute voix?
Vous ne pouvez pas imaginer le soulagement que m'octroient les moments passés au bord de la mer, contemplant les écumes qui manifestent ses mécontentements, les images de sagesse et de générosité provenant de la réflexion des rayons lumineux sur elle, quand elle fait la sage et l'impassible. Au fond de moi, je sens une sorte d'alchimie qui transmue tout ce qui est abimé en intact, tout ce qui est avili en or. Loin de tout rabat-joie, ces moments de solitude, de méditation profonde passent pour des confessions, des purgations de mon esprit et de mon âme. La mer dans son immensité est la seule à pouvoir, sans rancune, m'écouter les litanies ennuyeuses et moralisatrices quand les brises rafraichissantes faisaient comme un manteau de consolation pour l'invalide qui est en quelque sorte ma projection dans un monde ultra-littéraire, où ne règnent que de confuses paroles.
Je ne sais vraiment par quelle manœuvre osée ces paroles se sont rencontrées là, suivant un canevas soi-disant magique dont je suis impliqué de pied en cap.
Pourtant que cette histoire est aussi fragile qu'un mot écrit à la craie, elle a pu couler tant d'encre dans une tentative de nous faire croire qu'elle traite l'une des questions les plus cruciales de l'existence même. Pas forcément l'existence des êtres humains ou de la création elle-même, mais celle des idées rapaces, qui ne cessent de sillonner mes cieux autrefois sereins. Les idées qui peuvent avec brio paraître sous un jour angélique ne sont en réalité que de sournoiseries et des sourires cannibales qui ont immergé ma jeunesse dans une insondable platitude. Je ne me proclame ni l'apôtre de l'épicurisme, ni de l'équité sociale, loin à regret du dévouement héroïque. Épargnez-moi, par l'amour du Dieu, de tout endoctrinement, ça me donne la nausée.
Fils d'une enfance volée que j'étais, le petit matin de ma vie fut bourré de fantasme, j'ai tant attribué