J. Carbonnier, Droit civil, t. I, PUF, 2004, p. 73
Par-delà le droit considéré dans ses formes sensibles, lois, coutumes, jugements, existe-t-il un droit absolu, une idée (au sens platonicien) du droit, du juste, pièces constitutive de l'ordre du monde et, comme lui, universel et éternel ? C'est un domaine immense de spéculations pour la philosophie du droit, on dirait plus exactement : la métaphysique juridique.

----------------------J. Carbonnier, Sociologie juridique, 2ème éd., PUF, 2004, p. 22-24
La sociologie est née comme un chapitre de la philosophie, à côté d'autres chapitres plus anciens, la logique, la morale, la psychologie, et si plus tard elle s'en est séparée pour devenir une discipline autonome, elle a cependant conservé avec elle des liens d'affinités. Plus en retrait, la sociologie juridique a suivi un processus analogue, et si elle se veut indépendante de la philosophie du droit, elle n'en reste pas moins, même sans le vouloir, assez proche.
Avec la théorie du droit, les rapports s'établissent différemment. La théorie du droit ne se confond pas avec la philosophie du droit. Elle est l'affaire des juristes, et ceux-ci y travaillent sans métaphysique à partir de leur droit positif, tandis que les philosophes du droit se placent par vocation en dehors de tout droit positif, souvent même s'en prétendent l'antithèse (il n'est que de songer aux philosophies du droit naturel).
Par deux traits, l'un de méthode, l'autre de fond, la sociologie paraît justifier sa séparation de la philosophie, la sociologie juridique de la philosophie du droit. Mais ces traits ne sont pas d'une netteté parfaite. Des sages se rassemblant près d'un portique, un solitaire se promenant sous des tilleuls pourrait suffire à perpétuer la philosophie, voire à la faire progresser (si cela a un sens). Pour philosopher il n'est besoin que d'ouvrir les yeux et de raisonner juste, outre quelques livres choisis (afin de n'avoir pas toujours tout à recommencer). A la sociologie il faut