Car c’est bien la conférence de Messine qui va donner le signal de la relance européenne. L'ambiance y est détendue, d'autant plus que les négociations franco-allemandes sur la Sarre ont récemment abouti à des conclusions que chaque partie juge satisfaisantes. Malgré la volte-face de Monnet qui, le 21 mai 1955, se porte quand même candidat à sa propre succession, les Six s’accordent facilement sur la nomination de René Mayer, ancien président du Conseil des ministres français et fervent « Européen », à la présidence de la Haute Autorité. Ils maintiennent également le Belge Albert Coppé et l’Allemand Franz Etzel aux postes de vice-présidents du collège. Les six ministres consacrent ensuite l’essentiel de leurs travaux à l’examen des mémorandums allemand et italien mais surtout du mémorandum que les trois pays du Benelux ont arrêté ensemble le 18 mai et fait parvenir deux jours plus tard aux trois autres gouvernements. En pratique, les Six ne choisissent pas entre la poursuite de l’intégration sectorielle et la constitution par étapes d’un marché commun général. Aussi chargent-ils un Comité intergouvernemental d’étudier chacune de ces possibilités. Antoine Pinay, très réservé à l’égard d’un marché commun général et de ses éventuelles institutions, obtient d’ailleurs que ce comité soit formé, non pour rédiger des projets de traité, mais seulement pour étudier ce qu’il serait techniquement possible de faire. Aussitôt, les ministres du Benelux suggèrent que le comité, constitué de délégués gouvernementaux et d’experts, soit présidé par une personnalité politique chargée de coordonner les différents travaux. Leurs partenaires ne s’étant jusque-là guère préoccupés des questions de procédure, l’idée est aisément entérinée. Le nom de Paul van Zeeland, ancien Premier ministre et ancien ministre des Affaires étrangères de Belgique, est cité. Mais le 18 juin, c’est sur la proposition par la voie diplomatique de Johan Willem Beyen que Paul-Henri Spaak sera désigné par ses pairs