Conte arabe
Le conte est un genre fort ancien, offrant à travers une histoire plaisante, leçon et matière à réflexion. Sa transmission orale a assuré sa grande popularité, dans toutes les sociétés et à toutes les époques, que l'on pense aux Contes des mille et une nuits ou aux Contes de Perrault. Dans son recueil Mémoire en archipel, l'auteur contemporain R. Belamri livre un « Conte arabe », raconté à ses enfants par la mère du narrateur. Ce conte rapporte les mésaventures engendrées par l'animal favori du roi, un éléphant, ravageant les terres des paysans. Seul Jeha tente un instant de faire valoir ses droits, mais la passivité du peuple terrifié le contraint à renoncer à toute revendication. L'apologue offre ainsi une réflexion sur l'autorité fondée, sur la force et sur la lâcheté. Comment ce bref récit offre-t-il une critique efficace de la tyrannie et de ses conséquences ? Nous verrons tout d'abord en quoi ce texte a bien les caractéristiques d'un conte. Nous étudierons ensuite les critiques formulées indirectement par ce conte.
Tout d'abord, le « Conte arabe » de R. Belamri se présente d'emblée comme un récit enchâssé dans un récit cadre : des enfants demandent avec insistance à leur mère de leur raconter « l'histoire de l'éléphant du roi ». Ce récit cadre, extrêmement bref, présente un dialogue in medias res suivi d'une phrase de récit au passé, sans aucune contextualisation. On sait simplement que ce récit relève d'un souvenir d'enfance du narrateur. L'histoire racontée par la mère est elle aussi exposée de façon plutôt indéterminée, elle n'a pas véritablement de titre mais est simplement présentée par deux fois comme « l'histoire de l'éléphant du roi ». Cette transmission orale et le goût très vif des enfants à l'entendre rattachent nettement l'histoire à l'univers du conte. Le récit enchâssé lui-même confirme cette impression dès sa première phrase : « Il y avait un roi », qui n'est pas sans évoquer la fameuse formule initiale des contes