Discussion sur « interprétations ‘post factum’ », in merton r. k., eléments de théorie et de méthode sociologique, trad.fr., paris, 1997
Céline Mahieu
À lire les quelques pages que Merton consacre aux interprétations « post factum », on est tenté de penser que l’auteur est un adversaire sans merci de la démarche inductive : « L’analyse est conforme aux faits, mais l’on n’a aucune précision sur les données qui pourraient jeter un doute sur la valeur des interprétations. En conséquence les preuves documentaires ne font qu’illustrer la théorie au lieu de la prouver. » (p. 34) Mais remet-il en cause fondamentalement la validité d’une démarche dans laquelle l’interprétation suit plutôt qu’elle ne précède l’observation ? Une partie de la réponse à cette question se trouve dans la distinction qu’il opère entre les interprétations post factum et « des procédés apparemment similaires qui utilisent les matériaux de l’expérience pour construire de nouvelles hypothèses qui seront à leur tour confirmées par de nouvelles observations. » (p. 32) Bien que cette distinction ne soit pas tout à fait clarifiée dans la suite du texte, il me semble qu’on peut y voir une ouverture à des démarches proches de la Grounded Theory, qui ne se contente pas de formuler des hypothèses ad hoc au départ des faits mais qui place la comparaison au cœur du processus de recherche. La comparaison systématique constitue selon moi une manière efficace de répondre à la critique que Merton adresse aux interprétations post factum quant aux « interprétations parallèles également en accord avec ces données (qui) n’ont pas été systématiquement explorées » et aux « conclusions tirées de l’interprétation (qui) n’ont pas été contrôlées par de nouvelles observations. » (p. 33)
Par ailleurs, on trouve une nouvelle concordance possible entre ce que dit Merton de la méthode inductive et les exigences attachées à la Grounded Theory dans son paragraphe consacré aux «