Dissertation sur les héros médiocres
L’emploi de tels personnages vertueux semble incontournable pour donner son sens au roman. Cependant, de nombreux auteurs n’ont pas hésité à mettre en scène des antihéros, médiocres personnages, particulièrement depuis le XIXème siècle. Ce choix vise généralement à se rapprocher de la réalité, et peut également adresser un message ou exprimer une opinion. Une telle œuvre est alors également porteuse de caractéristiques de son époque. En 1857 paraît le roman Madame Bovary de Gustave Flaubert, dont l’héroïne reste aussi célèbre que l’ouvrage ; et pourtant Emma Bovary est un personnage médiocre, qui rêve d’une vie exaltante de conte de fées qu’elles lisait dans son enfance, mais se retrouve mariée à un homme qui ne la satisfait en aucun point, malgré sa situation aisée. Flaubert dénonce ainsi à travers ce roman sans grandes péripéties ni aventures trépidantes les « mœurs de province », par l’intermédiaire d’un personnage bien peu attachant. Madame Bovary stigmatise les stéréotypes féminins de la bourgeoisie de l’époque. Pour sa part, Zola place la médiocrité de ses héros au service de sa thèse sur l’incidence de l’hérédité et du milieu sur le destin de ses personnages. Ainsi, dans L’Assommoir, l’alcool précipite Gervaise dans la déchéance, et sa fille Nana ne connaîtra pas un meilleur sort. Tout au long de ses romans, Zola met l’accent sur les défauts de ses héros. Il met aussi en scène la cruauté, comme dans Thérèse Raquin où les deux amants assassinent le mari afin d’atteindre un hypothétique bonheur qui restera inaccessible. Ses personnages subissent leur destin plus qu’ils ne le maîtrisent, comme ils subissent le poids de la société et de la condition humaine. Cette dernière est révélée médiocre à travers le réalisme de Zola. Lorsqu’elle est poussée à son paroxysme, la médiocrité révèle chez Céline l’absurdité de l’existence. Dans Voyage au bout de la nuit, Ferdinand Bardamu que rien ne prépare à devenir un héros est