Fables
En quoi notre Amoureux ne se pressait pas tant : Bien adresser n'est pas petite affaire.
Deux Veuves sur son coeur eurent le plus de part ; L'une encor verte, et l'autre un peu bien mûre, Mais qui réparait par son art Ce qu'avait détruit la nature. Ces deux Veuves, en badinant, En riant, en lui faisant fête, L'allaient quelquefois testonnant , C'est à dire ajustant sa tête.
La Vieille à tous moments de sa part emportait Un peu du poil noir qui restait,
Afin que son Amant en fût plus à sa guise.
La Jeune saccageait les poils blancs à son tour.
Toutes deux firent tant, que notre tête grise
Demeura sans cheveux, et se douta du tour. Je vous rends, leur dit-il, mille grâces, les Belles, Qui m'avez si bien tondu : J'ai plus gagné que perdu ; Car d'hymen point de nouvelles.
Celle que je prendrais voudrait qu'à sa façon Je vécusse, et non à la mienne. Il n'est tête chauve qui tienne ;
Je vous suis obligé, Belles, de la leçon.
L'Homme entre deux âges et ses deux maîtresses est la dix-septième fable du livre I de Jean de La Fontaine situé dans le premier recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1668. Cette fable est précédé par La Mort et le Bûcheron et est suivie par Le Renard et la Cigogne. Cette pièce n'est pas exactement une fable, plutôt un récit allégorique ; mais il est si joli et rend si sensible la vérité morale dont il s'agit, qu'il ne faut pas se rendre difficile. Dans l'Esope, cette fable était nommée : Le Grison et ses maîtresses, et dans Phèdre : D'un Homme devenu chauve. C’est l’histoire d’un homme avec des cheveux « poivres et sel » (noirs et blancs) qui veut se marier. Il a deux prétendantes, qui sont veuves : une jeune et une plus vieille. Il les a un peu fréquentées pour choisir laquelle il épousera. La