L'intimité entre les deux supposés partenaires est marquée par le fait que la duègne se retire. Le compliment bien tourné de Cyrano sur 3 vers nous met dans l'atmosphère privilégiée, intense, de cette rencontre, seule à seul: «vous, me»: il s'agit de recevoir une parole («pour me dire»), suite à une démarche: «Vous venez», cette dernière expression en interpellation respectueuse en début d'alexandrin, comportement peu habituel chez une jeune fille, même en compagnie de sa duègne: «jusqu'ici». Et Cyrano jouit profondément de ce moment, vu la tournure religieuse donnée à cette entrevue: intense avec «tous»; exceptionnelle avec «instant/instants», avec le mot «béni» à la fin de l'alexandrin. Ce, à la demande de la jeune fille, comme le rappelle implicitement Cyrano. La démarche est inhabituelle à l'époque, et il faut des circonstances exceptionnelles pour ainsi déroger aux us et coutumes régissant les relations entre hommes et femmes: le principe est que l'homme propose et la femme dispose. c'est ce que rappelle le deuxième vers. Notons que le registre est lyrique, marqué par l'effusion retenue, comme le marquent le tétramètre du v. 145, puis le rythme 1/2/3 avec la diérèse: ou-bli-er suivi derechef de 3/3 puis d'un tétramètre. La thématique courtoise est de rigueur, avec la différence entre l'aimée divinisée censée vaquer à de hautes préoccupations («cessant d'oublier»), et maîtresse en fait de la situation, et l'amant - ici, en fait, l'amoureux - [rappel: au XVIIème, l'amant aime et est aimé, sans pour autant posséder l'objet de son désir, tandis que l'amoureux aime sans être aimé] par définition humble: cette distance est traditionnelle.
La didascalie montre que nous sommes dans le cadre de ce rendez-vous galant: on n'affiche pas, bien sûr, ses sorties et ce n'est que dans l'intimité que l'on se dévoile, ici démasque puisque Roxane sort incognito (cf. le voile ailleurs, chez nous; le châle porté dans les églises jusqu'aux années cinquante, voire la voilette jusque