Je pense donc je depense
Article paru dans l'édition du 05.10.01
Nicolas Herpin à la recherche des motivations du consommateur
En économie, la théorie du consommateur est simple. La trajectoire de son revenu et celle de l'offre marchande, traduite par les prix relatifs des biens et services, fournissent, en se croisant, un résultat d'apparence convenable. A condition que l'on se fonde sur la stabilité des goûts du consommateur. Un peu facile, non ? C'est pourquoi la sociologie de la consommation est indispensable, comme l'avaient pensé depuis des lustres Georg Simmel, Thorstein Veblen, Max Weber, Maurice Halbwachs et bien d'autres. Nicolas Herpin, dans son excellent petit ouvrage, propose une réflexion bourrée de références sur les motivations de nos contemporains.
Ouvrant son analyse sur le comportement des foyers à bas revenus, il constate qu'en France il n'y a pas de définition officielle du seuil de pauvreté (empiriquement, on l'a fixé au minimum vieillesse, c'est-à-dire à 3 500 F par mois pour une personne vivant seule). Selon Chombart de Lauwe, le risque de tomber dans la misère augmente à plusieurs époques du cycle de la vie du foyer (adolescence des enfants, départ à la retraite du chef de ménage ou, bien sûr, chômage). Cela dit, la mauvaise gestion d'un budget peut conduire à la misère, même si les revenus dépassent largement le seuil de pauvreté. Inversement, « l'altruisme familial » (Halbwachs) permet de faire reculer efficacement la grande pauvreté. Il se traduit surtout par une priorité accordée aux dépenses de logement (bien collectif), alors que celles d'habillement ont tendance à traduire l'égoïsme ; l'alimentation, elle, occupe une position intermédiaire.
Dans les milieux aisés, la contrainte sociale se substitue à la contrainte économique. La « consommation ostentatoire », si bien analysée par Veblen à la fin du XIXe siècle, se prolonge de nos jours par l'attrait exercé par les produits « mode » et par le gaspillage. Elle s'opposait alors à