Kundera
On peut, en outre, assez clairement y lire plusieurs idées (romanesques) qui resteront chères à Kundera. La multiplicité de points de vue, essentielle au roman, met en évidence à quel point nos intuitions sur autrui sont souvent biaisées, voire totalement fausses. C'est particulièrement le cas de l'amour (par exemple Héléna brûle d'amour pour ce Ludvik dont elle interprète aveuglement chaque geste cynique) et plus généralement de toutes les attitudes lyriques caractéristiques de la jeunesse, dont les traits principaux sont la bêtise, l'ignorance et l'esprit de sérieux (d'où le titre - toute l'histoire de Ludvik n'étant que la conséquence, très sérieuse, d'une plaisanterie).
" (...) les terres de cette étrange liberté où n'existe ni honte, ni retenue, ni morale, dans le domaine de cette bizarre liberté ignoble où tout est permis, où il suffit d'entendre, au-dedans de soi, la pulsation du sexe, cette bête" (folio, p.39)
"J'étais celui qui avais plusieurs visages (...); et quand j'étais seul (quand je pensais à Marketa) j'étais humble et troublé comme un collégien. Ce dernier visage était-il le vrai? Non. Tous étaient vrais: je n'avais pas, a l'instar des hypocrites, un visage authentique et d'autres faux. J'avais plusieurs visages parce que j'étais jeune et que je ne savais pas moi-même qui j'étais et qui je voulais être" (...) "La machinerie psychique et physiologique de l'amour est si compliquée qu'à une certaine période de la vie le jeune homme doit se concentrer presque exclusivement sur sa seule maîtrise, si bien que lui échappe l'objet même de l'amour: la femme qu'il aime (...)"
J'étais "prêt à me rendre n'importe où pour être avec Marketa; tout cela parce que je l'aimais, mais essentiellement parce qu'elle était l'unique femme à mon horizon et que ma situation de