La femme et l'art - une fatalité masculine chez charles baudelaire et réjean ducharme
2993 mots
12 pages
Cette faculté caractéristique qu’ont les mythes de résister à l’oubli, au passage du temps, confère à certaines figures une grande puissance de signification. Le sens des mythes peut se doter de plusieurs connotations différentes, selon les époques, mais rares sont les figures importantes qui tombent dans l’oubli, puisque les mythes sont créés pour guider les êtres humains dans leur relation au monde. La femme fatale ou dangereuse, figure existant, semble-t-il, depuis que l’être humain connaît le langage, reste un mythe actuel même au XXIe siècle. En effet, Ève, Pandore, Circé, Méduse, les sorcières et autres figures féminines «envoûtantes» paraissant maintenant au grand écran ne sont que quelques exemples de l’actualisation dont le mythe de la femme fatale fait l’objet. Si ces nombreuses représentations sont toutes issues de l’imaginaire masculin, ce n’est pas un hasard. En effet, selon Dominique Maingueneau dans Féminin fatal, la femme fatale relève essentiellement du fantasme masculin, telle une énigme suscitant à la fois curiosité et crainte. Mais, tout en constituant une interrogation sur la Femme comme essence énigmatique, ce mythe semble, à toutes les époques et dans toutes les sociétés, se doubler d’une interrogation sur l’art. Ainsi, il semble qu’au XIXe siècle français, chez Charles Baudelaire, et au XXe siècle québécois, chez Réjean Ducharme, la figure féminine soit intimement liée à la quête artistique du beau. Nous constaterons que la double attitude d’attirance et de résistance chez l’homme par rapport au beau artistique s’applique aussi parallèlement à la femme fatale dans les œuvres étudiées. Dans un premier temps, les Écrits sur l’art de Baudelaire permettront de définir la dualité inhérente à la conception moderne du beau et de la femme. Puis, l’analyse des Fleurs du mal et du Nez qui voque montrera la permanence d’un mythe dualiste, celui de la fatalité attribuée à un modèle féminin.
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Baudelaire, critique d’art, pose un regard particulier sur