La mondialisation, un monde de flux
Texte :
« Malheur à qui n'a plus rien à désirer ! Il perd pour ainsi dire tout ce qu'il possède. On jouit moins de ce qu'on obtient que de ce qu'on espère, et l'on n'est heureux qu'avant d'être heureux. En effet, l'homme avide et borné, fait pour tout vouloir et peu obtenir, a reçu du ciel une force consolante qui rapproche de lui tout ce qu'il désire, qui le soumet à son imagination, qui le lui rend présent et sensible, qui le lui livre en quelque sorte, et pour lui rendre cette imaginaire propriété plus douce, le modifie au gré de sa passion. Mais tout ce prestige disparaît devant l'objet même ; rien n'embellit plus cet objet aux yeux du possesseur ; on ne se figure point ce qu'on voit ; l'imagination ne pare plus rien de ce qu'on possède, l'illusion cesse où commence la jouissance. Le pays des chimères est en ce monde le seul digne d'être habité, et tel est le néant des choses humaines, qu'hors l'Être existant par lui-même, il n'y a rien de beau que ce qui n'est pas. (…)
Vivre sans peine n'est pas un état d'homme ; vivre ainsi c'est être mort. Celui qui pourrait tout sans être Dieu, serait une misérable créature ; il serait privé du plaisir de désirer ; toute autre privation serait plus supportable. »
Jean Jacques Rousseau, La Nouvelle Héloïse.
Commentaire :
Dans ce texte, Rousseau bouscule totalement les idées couramment reçues du désir. En effet, il remet en cause l’aspect négatif du désir. Ainsi, Rousseau nous montre ici que le désir est un élément positif dans l’existence de chacun qui est lui-même un bonheur. Il nous présente ici les deux cas de figure : la période où l’objet est désiré, laissant l’imagination libre d’améliorer virtuellement l’objet, puis la période de la possession de l’objet, annihilant tous les efforts de l’imagination par ce retour à la réalité.
On remarque que le texte peut être organisé en trois mouvements. Dans un premier mouvement, Rousseau écrit que le bonheur est dans le désir,