Le futur du travail : toujours plus de servitude
Jean-Pierre Durand présentation L. Salters
L’environnement professionnel exerce une pression de plus en plus forte sur les individus. Et l’avenir ne semble pas s’éclaircir, diagnostique le sociologue Jean-Pierre Durand de l’université d’Evry-Val-d’Essonne. Il a fait du Travail le centre de sa recherche.
La photo est choquante. Elle a fait le tour des journaux et du net en avril 2011. Un parking, un mur blanc, des traces de fumée noire. Juste à côté, un bouquet de fleurs. Sur ces lieux, quelques heures auparavant, un employé de France Télécom a mis fin à ses jours en s’immolant. Âgé de 57 ans, il s’est suicidé sur le parking de son lieu de travail à Mérignac, en Gironde. Selon son fils, il occupait depuis plusieurs années des postes qui ne correspondaient pas à ses qualifications. Il allait très mal.
Après la série de suicides sans précédent en 2009, qui avait poussé vers la sortie le PDG d’alors, Pascal Lombard, les choses semblaient s’être calmées. Des mesures avaient été prises, y compris au Ministère du Travail, où l’on rappelait que les thèmes de la santé et du bien-être au travail devaient être intégrés dans la formation des managers... Mais on ne balaye pas le malaise des individus d’un simple coup de baguette politique. Depuis plusieurs années, France Telecom, l’opérateur “historique”, a entamé une grande mutation. Forçant ses employés à s’adapter coûte que coûte. Le salarié de Mérignac était au bout du rouleau. Cet exemple montre de façon extrême à quel point le monde du travail d’aujourd’hui est devenu un espace de tension permanente. Le capitalisme paternaliste de nos grands parents n’est plus. Il a fait place à un univers où le résultat et la performance sont devenus des piliers. “On organise de plus en plus la docilité de l’homme dans l’entreprise”, résume Jean-Pierre Durand, sociologue du travail, directeur du centre Pierre Naville à l’université d’Evry-Val-d’Essonne. “Aujourd’hui,