Le grand rectificatif de la crise
Dans le fond, ce serait un joli sujet de philosophie à proposer au bac. Commentez ce témoignage à charge de Steve Schifferes : "L'incapacité de prévoir la crise et le manque d'outils permettant de l'analyser ont alimenté le cynisme du public à propos de la fibre morale et de l'incompétence des principaux acteurs du drame." Le métier de chroniqueur financier ne sort pas indemne du réquisitoire du professeur de journalisme à la City University de Londres. Sa formule s'impose : mea culpa, mea maxima culpa.
Alors que les enquêtes, livres, films et rapports sur la cause de la tourmente financière de 2008-2009 foisonnent, le rôle des médias dans ce drame est passé quasiment inaperçu dans la lame de fond des nouvelles économiques mondiales. Pourtant, à écouter cet ancien producteur de la BBC, il y a de quoi dire.
Tout d'abord, explique le fieffé inquisiteur, l'extrême spécialisation des journalistes financiers les a empêchés de jauger les dysfonctionnements de la haute finance. Les rapports entre les marchés et le boom de l'immobilier ont été sous-estimés. Le lien entre l'explosion des produits financiers hypercomplexes et la spéculation a été mal évalué. Il en est de même de la prise de risque encouragée par l'appât de bonus mirobolants, moteur du naufrage collectif.
Par ailleurs, l'immoralité de l'accueil réservé aux pétrodollars ou du statut fiscal privilégié offert aux grosses fortunes a échappé aux éditorialistes. Au contraire, ils n'ont cessé d'applaudir l'afflux des capitaux étrangers dans les coffres de Wall Street comme de la City ou le soutien des rabatteurs de fonds des grandes places financières que sont les paradis fiscaux. Et Steve Schifferes de pointer l'adhésion aveugle et inconditionnelle des professionnels de l'information aux lois du marché. Les stars de l'argent ont été placées sur un piédestal, dans le genre magazine de l'actualité heureuse.
L'expert londonien critique également la difficulté des journalistes à