Les misérables, un léviathan
Les Misérables sont une œuvre cannibale qui phagocyte tous les genres et registres. D'abord parce qu'elle est un véritable pot-pourri des genres. C'est un poème épique : « Faire de la conscience, ne fût-ce qu'à propos du plus infime des hommes, ce serait fondre les épopées dans une épopée supérieure et définitive », déclare-t-il. Pour Rimbaud et Baudelaire, le roman est un poème, construit à partir de puissantes images et symboles, d'effets rythmiques et sonores pour susciter l'émotion... C'est une poésie épique qui peint une grande âme. Les ingrédients du genre de l'épopée sont réunis : affrontement des forces, courage et générosité du héros, art du spectaculaire ( images, personnification, amplifications, suspense... ). Hugo définit lui-même son œuvre comme «une sorte d'épopée sociale de la misère.» Une lutte impossible est engagée entre les pauvres broyés par la société. Mais l'œuvre est aussi une épopée par la description des combats de l'âme : les combats de Jean Valjean entre le bien et le mal, son rachat jusqu'à son abnégation, le combat de Javert entre respect de la loi sociale et respect de la loi morale. La grande distinction avec l'épopée traditionnelle, c'est le lieu de la lutte : la conscience du héros.