Les réécritures
« Depuis que le monde est monde, tout le monde copie sur tout le monde » affirme Claude Gagnière dans son essai Pour tout l’or des mots, paru en 1996. Il met au défi tout écrivain en herbe de « faire du neuf » en littérature. Au-delà de son aspect quelque peu provocateur, cette remarque pose la question plus sérieuse de savoir si la « littérature » peut être autre chose qu’une « réécriture ». Qu’entend-on au sens de réécriture ? Peut-on établir un lien entre le « crime » littéraire qu’est le plagiat et le sentiment familier de « déjà lu » qui donne au lecteur cultivé le plaisir de remonter le cours de l’écriture ? Il convient de différencier la réécriture « assumée » par son auteur : imitation, parodie, pastiche, voire plagiat, de la réécriture « inconsciente » où l’écrivain est comme rattrapé et submergé par son passé de lecteur. Si l’on prend le mot réécriture en son sens large, qui va de la doctrine de l’imitation à la notion plus diffuse d’intertextualité, faut il en conclure qu’on peut être « réécrivain malgré soi » ?
Dans une première partie nous soulignerons les multiples formes que peuvent prendre les œuvres qui s’affichent comme des réécritures.
Ensuite nous verrons que certains écrivains veulent à tout prix affirmer leur singularité face aux écrivains passés et à venir.
Enfin nous nous demanderons si l’on peut échapper à l’intertextualité quand on est écrivain.
De nombreuses œuvres littéraires se présentent comme des réécritures. Mais la posture de ceux qui les ont « commises » diffère selon les époques et ces écrits ont chacun leurs spécificités… Les écrivains du XVIIème siècle défendent la doctrine de l’imitation des Anciens : ils affirment leur volonté d’imiter aussi bien le fond que la forme de ces chefs d’oeuvre. Ainsi, Racine, dans sa préface d’Andromaque s’en réfère à Aristote pour les règles de la tragédie et aux tragiques et poètes grecs pour le choix de son sujet et la