maline verlaine
C'est le dernier poème de la série Paysages belges.
Il se présente à nous comme une sorte d'énigme visuelle : nous voyons d'abord et nous comprenons ensuite ce que nous voyons.
Suivre l'ordre du texte est ici essentiel, car toute l'habileté de composition de Verlaine consiste à présenter les effets avant les causes, à retarder l'explication et à ne donner la clé qu'au début de la troisième strophe.
I. Le paysage-énigme
• Vers les prés... Où sommes-nous ? Vers indique une proximité, une direction mal définie (Verlaine aime les prépositions de « localisation floue » : vers, parmi, entre, par, etc.) Le pluriel de prés ajoute encore à notre indécision.
• Sur ce fond vague et indistinct, une image surgit et se détache avec la plus fine précision : Les
« girouettes, détail fin / Du château de quelque échevin ». Le mot de « couleur locale » : échevin rattache l'évocation à la Belgique du passé, celle des « vieilles estampes » de l'exergue.
• Rouge de brique et bleu d'ardoise... ( ≠ de brique rouge).
Ce qu'on voit d'abord, c'est une tache colorée. Formes et matières ne viennent qu'ensuite. L'impression produite par les choses compte plus que l'idée que nous avons d'elles.
• Vers les prés clairs, les près sans fin : l'image du château un instant apparue, s'est comme évanouie. La strophe s'achève, en retournant à son début ; la répétition du mot prés crée un effet de profondeur, d'éloignement > nous sommes dans un « plat pays » où le regard porte loin.
• La seconde strophe accentue les effets de profondeur déjà apparus (« Échelonnent mille horizons »), mais en y ajoutant une impression de rêve, d'irréalité : les arbres sont « comme les arbres des féeries »
(décors de théâtre ? …), les frondaisons sont vagues. L'alliance de mots : « Sahara de prairies », en superposant l'idée d'aridité (« Sahara ») et celle d'humidité (« prairies ») contribue à la fois à déréaliser le paysage et à accentuer l'impression de profondeur.
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