Ponge-le parti pris des choses
Le Parti pris des choses tente de rendre compte des objets de la manière la plus précise et la plus rigoureuse possible, cherchant en particulier à exprimer leurs qualités caractéristiques. Ce compte-rendu porte sur les qualités physiques de l'objet (Ponge recourt volontiers au vocabulaire technique des sciences expérimentales ; signalant à plusieurs reprises sa dette envers Buffon ou de Emmanuel de Martonne[4], il insiste sur la parenté entre son travail et la recherche scientifique), mais aussi sur les qualités linguistiques du mot désignant l'objet, en particulier l'étymologie, mais aussi le choix et l'ordre des lettres qui composent le mot. Ainsi Ponge écrit-il en ouverture du Cageot : « À mi-chemin de la cage au cachot la langue française a cageot ». L'ambition du poème consiste alors à établir des liens justifiant le rapprochement entre l'objet d'un côté et le mot de l'autre - ce que Ponge appelle « fonder (le mot) en réalité » : on a pu ainsi qualifier son travail de cratylisme[réf. souhaitée], par référence au Cratyle de Platon où Socrate tente d'établir des étymologies ainsi « fondées en réalité ».
Il en découle que chaque objet commande sa propre rhétorique, et jusqu'à la forme même du "poème" destiné à rendre compte de ses qualités. Ponge résume cette recherche par une équation frappante : « En somme voici le point important : PARTI PRIS DES CHOSES égale COMPTE TENU DES MOTS. » (Méthodes, "My Creative Method", daté "Sidi-Madani, lundi 29 décembre 1947"). Le signifiant est alors exploité tant phoniquement que graphiquement (Ponge fréquente assidûment les peintres, notamment Braque, Picasso et Fautrier auxquels il consacre des essais). Ainsi le mot s'emploie-t-il comme matériau du texte (Ponge s'inscrit dans la lignée poétique de Rimbaud, Lautréamont, Mallarmé et Roland Barthes).
Cependant, les jeux de lettres relèvent de l'arbitraire de la langue et de l'irrationnel (le rapprochement entre "cage",