Roman memoire
Avant d'étudier l'insertion de dramaturges devenus personnages romanesques, celle de titres de pièces ainsi que les références intertextuelles présentes dans les romans de notre corpus, il convient de définir ce sous-genre romanesque qui émerge dans la seconde moitié du XVIIe siècle et qui connaît son heure de gloire au XVIIIe siècle, où il partage le devant de la scène avec le roman épistolaire. On propose de revenir brièvement sur ses origines et sur les premiers grands romans-mémoires du XVIIIe siècle afin d'en dégager les principales caractéristiques.
Rappelons d'abord que ce sous-genre romanesque est un récit à la première personne du singulier dont le personnage principal écrit ses mémoires qu'il présente comme des faits véritables. Ces mémorialistes fictifs entreprennent le récit de leur vie après s'être retirés du monde, « situation qui rend l'esprit sérieux et philosophique! », comme l'écrit l'éditeur de La Vie de Marianne, et qui «inspire un esprit de rétlexion2 ». Ces personnages posent un regard rétrospectif sur leurs premières années qu'ils veulent présenter à la lumière des connaissances et de l'expérience acquises. Il s'agit d'un roman de l'introspection qui place le Moi au cœur de l'analyse morale: celui-ci fait l'objet d'une véritable dissection afin de révéler les ressorts cachés qui ont déterminé discours et actions passés. Mais le roman-mémoires est aussi un roman de l'intériorité où le Moi éprouve un plaisir manifeste à se raconter, à se mettre en scène et à exprimer ses sentiments les plus intimes. Il trouve donc naturellement sa place dans une étude du roman à la première personne dont René Démoris a retracé l'histoire depuis ses origines dans le récit picaresque espagnol jusqu'à son apogée avec Marivaux et Prévost.
1. De son origine à son épanouissement
René Démoris souligne l'importance du roman picaresque espagnol qui fut le premier à utiliser la première personne, bien qu'il n'ait pas donné