Je suis né. Je n’insisterai pas sur ce fait, peu caractéristique en lui-même. Mais ce petit malheur devait être le premier maillon d’une chaine de calamités du même ordre : Imposées par les circonstances jamais librement acceptées. L’homme vient au monde de façon peu digne, indépendante non seulement de sa propre volonté mais souvent même de celle des auteurs responsable. Ainsi la naissance est-elle une leçon de choses, la première mais non la moins magistrale. La nature nous dit, comme elle nous le répétera plus tard jusqu'à la nausée : « Tu es le plus faible, tu dois te laisser faire. » Naître n'est que la première étape d'une longue série noire. On commence en se laissant enfanter ; puis on se fait nourrir, instruire, éduquer, et l'on devient ainsi, petit à petit, la proie des hommes, des femmes et des évènements. Et l'habitude est si bien prise qu'il devient bientôt impossible de remonter le courant. Nous n’avons jamais eu le choix. Comme on nous a embarqués dans la vie sans nous consulter, ainsi notre voie a-t-elle été tracée d’avance, point par point et nous sommes depuis notre naissance en service commandé.
Mais les hommes sont ainsi constitué qu’ils préfèreront toujours un agréable mensonge à une évidence hérissée de piquants. Nous ne pouvons donc pas transformer l’âme des hommes. Nous voulons tous avoir raison, nos idées nous semblent les meilleures, nos sentiments les plus justifiés.
Ce qui est étrange c’est qu’il est mille façons de se sentir malheureux mais on aurait tendance à croire qu’il n’en n’est qu’une d’être heureux.
Si vous trouvez dans mes conclusions quelque chose qui vous irrite, ne vous énervez pas, ne vous indignez pas pensez tout bonnement que j’ai dit cela pour rire et hausser les épaules à cette bouffonnerie. Mais inversement si l’une de mes paroles vous agrée, même exprimée sur un ton badin, soyez bien certain que je ne voulais pas uniquement plaisanter et qu’une pincée de sérieux était insidieusement glissée parmi mes