UNE PARODIE DES MOEURS CAMPAGNARDES ?

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UNE PARODIE DES MOEURS CAMPAGNARDES ?

a guerre picrocholine elle-même a pu sembler travestir, comme on l'a parfois trop marqué, une banale affaire de navigation sur la Loire. Le seigneur de Lerné, Gaucher de Sainte-Marthe, avait installé sur les rives du fleuve des pêcheries qui entravaient la circulation, il se trouvait en procès avec la communauté des marchands et les propriétaires voisins. Rabelais se serait ingénié à faire reconnaître les parties dans les comparses du Gargantua : le chef des fouaciers, butor plein d'insolence, reçoit le nom de Marquet (chap. XXVI), celui de la femme de Sainte-Marthe, et les contemporains, à tout le moins chinonàis, ont dû le reconnaître, non sans sourire. De même le personnage d'Ulrich Gallet, maître des requêtes auprès de Grandgousier, « homme saige et discret, duquel en divers et contencieux affaires il (Grandgousier) avoit esprouvé la vertus et bon advis » (chap. XXX), ressemble fort, et par son nom et par la haute tenue de son discours, à Jehan Gallet, parent d'Antoine Rabelais et avocat de la communauté. La guerre picrocholine, en un sens, ne serait que la transposition, sous forme d'une parodie des romans de chevalerie, d'un procès de chemins vicinaux, de voies de passage, de murs mitoyens. Une des réalités les plus coutumières de la vie campagnarde donne son point de départ à une aventure qui, en fait, dénonce par le rire l'inanité des querelles de clocher : tout le monde finit par en oublier l'origine, mais elles persistent parfois des générations durant. L'intelligence des moeurs rurales et l'observation malicieuse permettent à Rabelais un tableau à la fois véridique et suggestif .
« En cestuy temps, qui fut la saison de vendanges, au commencement de automne, les bergiers de la contrée estoient à guarder les vines et empescher que les estourneaux ne mangeassent les raisins.
« Onquel temps les fouaciers de Lerné passaient le grand quarroy menans dix ou douze charges de fouaces à la ville. » (Chap. XXV.) En

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