L'enfant et la rivière
Alice fait la connaissance de trois personnages étranges, le Chapelier, le Loir et le Lièvre de Mars. Une conversation pleine de non-sens s’engage.
« Pourquoi un corbeau ressemble à un bureau ? »
« Fort bien, nous allons à présent nous amuser ! pensa Alice. Je suis contente que l’on ait commencé à poser des devinettes. » « Je crois que je pourrai deviner cela », ajouta-t-elle à haute voix.
« Voulez-vous dire, demanda le Lièvre de Mars, que vous pensez pouvoir trouver la réponse à la question ?
- Précisément, répondit Alice.
- En ce cas, poursuivit le Lièvre de Mars, vous devriez dire ce que vous pensez.
- Je dis ce que je pense, s’empressa de répondre Alice ; ou du moins…, du moins je pense ce que je dis… et c’est la même chose, n’est-ce pas ?
- Pas du tout la même chose ! protesta le Chapelier. Tant que vous y êtes, vous pourriez aussi bien dire que « je vois ce que je mange », c’est la même chose que « je mange ce que je vois » !
- Vous pourriez aussi bien dire, ajoute le Loir, qui semblait-il, parlait tout en dormant, que « je respire quand je dors », c’est la même chose que « je dors quand je respire » !
- Pour toi, c’est bel et bien la même chose », dit au Loir le Chapelier, et là-dessus la conversation s’interrompit et le petit groupe se tint coi1 une minute durant, tandis qu’Alice passait en revue dans son esprit tout ce dont elle pouvait se souvenir à propos de corbeaux et de bureaux, et cela n’était pas grand-chose.
Le Chapelier fut le premier à rompre le silence : « Quel jour du mois sommes-nous ? » demanda-t-il en se tournant vers Alice : il avait tiré sa montre de son gousset2 et la regardait d’un air inquiet, en la secouant et en la portant à son oreille de temps à autre.
Alice réfléchit un instant, puis répondit : « le 4.
- Elle retarde de deux jours ! soupira le Chapelier. Je vous avais bien dit que le beurre ne valait rien pour le mouvement3 ! » ajouta-t-il en lançant au Lièvre de Mars des regards courroucés4.