Acte 5 scene 2 de dom juan - l'ignorance du valet
Après avoir déçu Sganarelle qui se réjouissait de sa conversion («Tu crois que ma bouche était d’accord avec mon coeur»), Don Juan justifie l’hypocrisie : elle «est un vice à la mode, et tous les vices à la mode passent pour vertus. Le personnage d’homme de bien est le meilleur de tous les personnages qu’on puisse jouer aujourd’hui […] l’hypocrisie est un vice privilégié qui, de sa main, ferme la bouche à tout le monde […]»
Il devient alors le porte-parole de Molière, auteur qui, comme dans la comédie antique, s'adresse aux spectateurs, plus qu’il s’adresse à son valet trop simple pour entendre un pareil langage. La tirade a d’ailleurs un style différent qui fait penser à La Bruyère. Non sans découragement, Molière, au nom de la nature et de la vérité, se révolte contre la corruption de l'époque. L'imposture est toujours respectée. Dans ce manuel du parfait hypocrite, il décrit la tactique. Il poursuit la querelle du “Tartuffe”, car «L’hypocrisie est un vice privilégié qui, de sa main, ferme la bouche à tout le monde» est une allusion à l'interdiction de la pièce en 1664. «La cabale» désigne la cabale des dévots animée par la Compagnie du Saint-Sacrement et qui s’était levée contre la pièce. La préoccupation d’une polémique encore toute brûlante est manifeste. La satire sociale se mêle donc ici à la psychologie du personnage, puisqu'en ce siècle se pratiquait l'hypocrisie religieuse : «C'est sous cet abri favorable que je veux […] mettre en sûreté mes affaires».
Puis, Molière se retire et on retrouve Don Juan, défiant le Ciel, jouissant du mal, comme Néron. Ses audaces franchissent toutes les bornes et libèrent son valet de sa couardise.
Cependant, Sganarelle, s’il a le cœur sain et des sentiments moraux, ayant plus le besoin que le talent de raisonner, ne fait, en cette fatrasie, que se livrer aux mots, que débiter, en une argumentation insensée, un galimatias sur l'enchaînement des causes et des effets, toutes sortes de vérités qui lui