Anouilh
Anouilh élimine la fourmi au profit du renard, réputé pour sa ruse, discret clin d’oeil au Roman de Renart.
La cigale devient le personnage principal, héroïne triomphante qui dément ainsi sa légende et la fable source. La cigale est en réalité une fourmi. Elle est le moteur du récit (vers 9), impose sa parole, calcule, décide, ordonne (« j’entends » répété deux fois, v. 38 et 42, « vous l’augmenterez », v. 40, « je veux », v. 50, contraignant le renard à « s’incliner », v. 57).
La progression de la fable
Une construction, efficace, est fondée sur un coup de théâtre qui constitue un renversement de situation et un retournement du sens de la fable de La Fontaine.
Au plaidoyer pro domo de celui-ci en faveur de la cigale, incarnation de l’insouciance prodigue du poète, Anouilh substitue une satire mordante du milieu artistique et fait de la cigale un personnage antipathique. La fable est construite à la façon d’une petite comédie grinçante en 5 actes :
– premier acte (vers 1 à Cool : présentation du personnage principal ;
– deuxième acte (vers 9 à 32), la visite chez le renard. La cigale se tait et écoute sagement ce dernier lui proposer un marché de dupes ;
– troisième acte (vers 32 à 44) : réponse inattendue de la cigale qui dévoile le personnage et constitue un coup de théâtre, le renard se tient coi ;
– quatrième acte (vers 45 à 55) : fausse sortie, très théâtrale, de la cigale qui se drape dans ses atours et occasionne un quiproquo, le renard se méprenant à nouveau sur son interlocutrice ;
– le dernier acte, bref (deux vers), en forme de dénouement et d’épilogue, revient sur le renard et sa décision de changer de métier.
La critique d’un certain milieu social
La cigale est une chanteuse en tournée dans les casinos. La fable est plaisamment actualisée dans le contexte des années soixante, aujourd’hui, la cigale passerait sans doute à la télévision.
Une fois sa tournée estivale achevée, elle cherche à