Arrêt du 26 juin 1973 (3ème chambre civile)
En l’espèce, une convention d’échange avec stipulation d’une soulte est conclu les 24 et 28 octobre 1967 entre deux parties, l’échange consistant en un lot de parcelles sur lequel un tiers au contrat possède un droit de préemption. Ce dernier s’oppose à cet échange.
La Cour d’appel d’Amiens, dans un arrêt rendu le 9 février 1972, estime que le montant de la soulte est si important qu’il convient de requalifier le contrat d’échange en un contrat de vente.
L’un des contractants se pourvoit alors en cassation aux motifs que les juges du fond ne peuvent requalifier une convention « dès lors qu’elle n’est entachée d’aucune obscurité ou contradiction » et que l’existence d’une soulte, somme versée en supplément du bien échangé, ne saurait changer la nature de la convention.
La cour de cassation rejette le pourvoi. Elle affirme que « les juges du fond ont le devoir de restituer aux conventions litigieuses leur véritable caractère juridique, sans être liés par la qualification donnée par les parties et peuvent estimer qu’il n’y a pas contrat d’échange lorsque l’importance de la soulte permet de la considérer comme l’objet principal de l’obligation de l’une des parties ». Elle estime en outre que les juges de second degré ont, à bon droit, déduit que l’acte authentique devait s’analyser en une vente, du fait de la disproportion de valeur des biens échangés, de l’importance anormale de la soulte d’une valeur biens supérieure à celle des parcelles reçues en échange et de l’intention des contractants de faire échec au droit de préemption du tiers.
S’est posée, en l’espèce, la question de savoir si une convention d’échange, entachée d’aucune obscurité ou contradiction, dans laquelle se trouve un déséquilibre certain de prestations peut faire l’objet d’une requalification souveraine