Dans le roman d’Albert Camus, le personnage de Meursault n’a pas d’histoire, aucune profondeur psychologique, pas même une identité complète, on sait qu’il vit en Algérie française mais par exemple il n’a pas de prénom. Nous n’avons aucune description physique due à la technique du journal intime, seules les sensations peuvent nous donner plus de précisions. Nous ne pouvons pas nous permettre de prétendre le connaître, encore moins de le juger. Nous sommes frappé par l’absurde, dès l’incipit du roman ; l’indifférence totale et absurde de Meursault face à la mort d’une mère, censé être un être cher. L’homme ne laisse apparaître, semble-t-il, aucune émotion, aucun chagrin, telle qu’on l’attendrait dans ce type de situation. Meursault continue naïvement de vivre en parfaitement harmonie avec la nature et les choses et est parfaitement étranger à tout ce qui est humain.
Le titre du roman exprime avec précision l’idiotie même de Meursault, idiotie au sens étymologique du terme : simple, unique, étranger au monde.

On peut dire que Meursault représente « l’homme absurde ». Meursault ne se sent concerné par rien. Ni par sa propre vie qu’il envisage de l’extérieur, ni même par son procès, qui ne le concerne là encore, que de l’extérieur. Il a tiré une première fois sur l’arabe alors que ce dernier ne songeait qu’à se défendre, puis quatre autre fois, alors que l’arabe était déjà à terre. Meursault étant face à une justice purement humaine, ne se prend tout de même pas pour un accusé, encore moins pour un coupable. Il ne comprend pas de quoi on l’accuse, et avant même la visite de son avocat il ne se doute pas une seconde que la mort de sa mère pourrait jouer un si grand rôle durant son procès.
Cette idée se voit renforcée par le refus net de Meursault d’exprimer sa psychologie intérieure, alors qu’il se révélera pour tout ce qui est concret et tangible d’une maniaquerie et d’une précision confondante : il procède par exemple au compte rendu méthodique de toutes les