Ciel brouillé
Formé de quatre quatrains en alexandrins, « Ciel brouillé » poursuit dans la section Spleen et
Idéal, le cycle consacré à Marie Daubrun et est directement adressé à elle avec l'utilisation de la deuxième personne du singulier. L'amour y paraît comme équivoque et conduit à un échec, à la rencontre avec le spleen. Dans la vie de Baudelaire, Marie Daubrun occupa une place difficile à cerner, une place oscillant entre la tendresse, la ferveur, l'animalité pure et l'adoration mystique. Ses yeux mystérieux firent d'elle la nouvelle muse de Baudelaire. Elle était en fait la douce femme aux yeux verts et l'empoisonneuse aux yeux de chat. De ses yeux, le poète passa, par une véritable correspondance, à une ambiance à la fois climatique et psychologique, puis à un paysage et alternant enfin « la femme » et « le climat » qui forment ainsi les deux thèmes du poème. La question à laquelle il conviendra, en analysant strophe par strophe, vers après vers, de répondre concerne le titre : pourquoi ce « Ciel brouillé »?
Dans le premier vers de la première strophe, Baudelaire commence par se généraliser luimême en utilisant le pronom indéfini « on » suivi d'un verbe au mode conditionnel, exprimant ainsi une hypothèse quant au regard, aux yeux de cette femme : l'idée du doute y apparaît déjà comme très importante. Le fait que ce regard soit couvert de vapeur, donc de brume, signifie qu'une sorte de barrière se forme et empêche de voir, de comprendre clairement. Cette barrière est mutuelle puisque
Baudelaire demande la couleur des yeux de la femme : bleus, gris ou verts. Cette idée de doute, d'incertitude ou encore d'amour voilà est accentuée par la mise en évidence du mot « mystérieux »
(v. 2) grâce à l'effet expressif créé par la diérèse employée à ce mot. Le regard se révèle également propice à la rêverie, car lesdites couleurs voilées suggèrent un mystère à percer, un au-delà dissimulé derrière le brouillard, la vapeur. Au second