Commentaire composé: la servante au grand coeur dont vous étiez jalouse...c.baudelaire
1610 mots
7 pages
[Introduction] Baudelaire, poète précurseur du symbolisme du milieu du XIXe siècle, publie en 1857 son chef-d’œuvre, Les Fleurs du Mal. La pièce LXIX, qui ne porte pas de titre, est consacrée à l’évocation d’une servante, morte au moment de l’écriture. Ce poème est composé de vingt-deux alexandrins en rimes plates, séparés en deux ensembles d’inégale longueur. L’évocation semble ainsi suivre le fil du souvenir, sans schéma préconstruit. Baudelaire s’abandonne au libre cheminement de sa pensée, qui mêle la précision d’un souvenir intime et la réflexion sur la mort et la nature humaine. Nous nous demanderons donc comment le poète réussit à évoquer une figure centrale de son enfance sans pour autant « prostituer les choses intimes de la famille », selon l’expression de l’une de ses lettres. Nous verrons dans un premier temps quel portrait de la servante se dessine dans ce texte, puis nous nous intéresserons au lyrisme de ce poème autobiographique, avant de réfléchir à la portée universelle de cette méditation sur la mort. [I. Un portrait]
Ce poème est consacré à la figure d’une servante qui a joué un rôle crucial dans son enfance. Celle-ci n’est pas nommée mais est évoquée dès les premiers mots du poème, à travers l’expression « la servante au grand cœur ». Aucune précision physique n’est donnée. L’évocation se concentre sur les qualités morales de la femme. Cette servante est en effet caractérisée par sa bonté et sa tendresse envers l’enfant. A son « grand cœur » s’ajoute un « âme pieuse » (v.21). Le cœur et l’âme sont le siège de l’affectivité et de la vie morale : Baudelaire ne fait en effet pas plus référence à ses qualités intellectuelles qu’à ces qualités physiques. Cette servante a tenu une place essentielle dans la vie de l’enfant. Ainsi avait-elle accès à sa « chambre » (v.18), ainsi le couvait-elle de « son œil maternel ».
La figure féminine que constitue la servante est en effet en confrontation directe avec une autre femme, la mère du poète,