Conditionnement socioculturel et liberté
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Guy Bajoit2
Introduction Le modèle culturel qui règne aujourd’hui sur les sociétés occidentales appelle avec insistance chacun de leurs membres à se construire comme individu et à devenir sujet et acteur de son existence personnelle. Répondre à cet appel implique le développement d’une certaine capacité de prendre de la distance par rapport au conditionnement social et culturel, autrement dit, d’agir librement. Il en résulte un paradoxe – notre conditionnement nous appelle à la liberté ! – et donc une question complexe : « Comment les individus contemporains gèrent-ils la tension entre leur conditionnement socioculturel et leur désir de liberté ? » Avant d’aborder cette question, et pour pouvoir y répondre, nous devons, préalablement, en examiner deux autres : - Que signifie être conditionné socialement et culturellement, et de quelle manière ce conditionnement opère-t-il ? - Que signifie être libre, qu’est-ce qu’un acte libre, et à quelles conditions la liberté devient-elle possible, bien qu’elle reste toujours limitée ? Nous aborderons ensuite la question qui nous occupe directement, la tension entre conditionnement et liberté. Pour des raisons pédagogiques, notre présentation prendra la forme de dix propositions théoriques qui s’enchaînent, et que nous soumettons ici à une discussion critique. Une précaution est indispensable avant d’entrer en matière. Notre démarche n’implique aucun jugement de valeur : le conditionnement n’est pas « le mal »,
Pour un développement plus complet, consultez mon livre : Socio-analyse des raisons d’agir. Études sur la liberté du sujet et de l’acteur, Québec, Presses de l’Université de Laval, 2009. 2 Guy Bajoit est professeur émérite de sociologie de l’Université Catholique de Louvain (Louvain-la-Neuve, Belgique). Courrier électronique : guy.bajoit@uclouvain.be.
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pas plus que la liberté ne serait « le bien ». Si nous n’étions pas conditionnés, nous ne survivrions pas :