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• « Le bonheur humain est composé de tant de pièces qu’il en manque toujours », dit Bossuet. Mais chacun définit différemment ces « pièces » du bonheur. Ainsi un moraliste philosophe comme Pascal, un fabuliste comme
La Fontaine – pratiquement contemporains au XVIIe siècle – ou des philosophes des Lumières aussi différents – et presque « ennemis » – que Voltaire et Rousseau font tous dépendre le bonheur d’éléments différents.
• Pour Pascal, être heureux c’est combler un « gouffre », un manque et remédier à une « impuissance », celle de l’homme. Ce ne sont pas des éléments terrestres concrets qui peuvent « remplir » ce vide, mais un « objet infini et immuable, c’est-à-dire Dieu ». C’est donc de la religion et de la foi que dépend le bonheur. Pour convaincre son lecteur, Pascal construit un raisonnement explicite très structuré, à la rigueur scientifique, dont chaque étape occupe un paragraphe : le premier pose une affirmation que consolident des connecteurs logiques (« et cependant », « donc »). Il procède par généralisation, en s’appuyant sur des phrases assertives qui ont l’allure de vérités générales ou de maximes grâce à des pronoms adjectifs indéfinis et au présent de vérité générale (« Tous les hommes recherchent d’être heureux » ; « C’est le motif de toutes les actions… »), à des adverbes intensifs « ne fait jamais… », « jamais personne… », « continuellement »), à des énumérations en cascade (l. 11-13) ou à des explications précises : « c’est-à-dire… »). La dernière étape de ce mouvement logique, comme une démonstration mathématique, se termine par une phrase ample qui pose une question immédiatement suivie de la réponse : le rythme et le souffle du dernier paragraphe entraînent l’adhésion du lecteur.
• La Fontaine a une conception du bonheur plus terrestre : le sage grec de la fable – derrière lequel se profile son auteur – trouve un serein bonheur dans un jardin qu’il cultive par lui-même avec modération : il se