La révolution conceptuelle engagée par Cunningham

La danse moderne naît du rejet du ballet classique, et d’une nouvelle façon d’appréhender le corps, et son lien avec l’esprit et la volonté. Ces leçons vont être intégrées, au point que la nécessité va se faire sentir d’aller plus loin dans cette remise en cause du ballet. Toutes les règles implicites qui régissent le spectacle de danse, ce qui nous semble évident à force de siècle d’habitudes, un certain Merce Cunningham va les questionner. La danse moderne avait commencé ce chantier en questionnant le corps (élément essentiel en danse), Merce Cunningham, lui, va questionner tout le reste. I Etats des lieux de la danse à l’aube des années 50 1) La danse d’expression Deux pays vont voir exploser la danse moderne : l’Allemagne et les Etats-Unis – la raison en est, partiellement, que la tradition classique y est plus faible que dans le reste de l’Europe, et qu’il y a donc la place pour que s’implante une nouvelle forme de danse. En Allemagne, les premiers fers de lance de la danse moderne passeront par l’enseignement de Laban. Les deux figures les plus importantes de ce courant chorégraphique, qui va se développer surtout dans l’entre-deux-guerres, ce sont Mary Wigman et Kurt Jooss. Beaucoup de choses les différencient : Mary Wigman est plus mystique, elle est principalement préoccupée par les rapports de l’homme à la nature, les rapports de l’individu aux grandes forces qui régissent l’univers. Kurt Jooss, lui, est plus politisé, est à cœur de mettre en scène les conflits politiques et sociaux qui agitent le monde. Mais ce qui les relie, c’est leur attachement à la pensée de Laban, et leur travail sur un mouvement qui, indépendamment des thématiques des spectacles dans lequel il s’inscrit, doit explorer le corps naturel et ses ressources, et non le forcer. On appelle généralement la danse moderne allemande de cette époque « danse d’expression », ou danse expressionniste. Parce qu’elle est, tout d’abord, voisine et