gorgias
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[Introduction avec phrase d’accroche tirée de Platon]
« J'éprouve,déclarait Calliclès, à l'égard de ceux qui cultivent la philosophie un sentiment très voisin de celui que m'inspirent les gens qui balbutient et font les enfants » (Platon, Gorgias, 484c-485e). Lacritique de la philosophie est, comme on voit, fort ancienne, et aujourd'hui encore, la philosophie est suspectée d'être à la fois difficile, comme sont les sciences les plus abstraites, mais, de plus,parfaitement inutile. Tout juste pourrrait-elle servir à dégourdir un peu l'esprit des adolescents, à condition de ne pas leur faire prendre vraiment l'entreprise au sérieux : il y aurait, des chosesbien plus importantes. Selon ce point de vue, la pensée, dont le philosophe prétend qu'elle est le domaine propre de son art, ne mériterait guère qu'on s'y applique : nos opinions, ces penséespersonnelles respectables, ne nous guident-elles pas bien assez dans cette vie ?
Pourtant, tout le monde convient qu'une vie réussie, aussi libre et heureuse qu'il est possible, conformément à notrehumaine nature, nécessite une pensée réfléchie, claire et distincte. Sans réflexion en effet, nous savons bien que nous risquons de commettre des erreurs, dont certaines sont lourdes de conséquences, pournous comme pour tous les autres hommes. Or, nos opinions sont-elles vraiment réfléchies ? Sont-elles même seulement personnelles, comme on le croit si volontiers ? Et nous guident-elles efficacement,dans nos affaires privées comme dans les affaires de la cité ? Depuis Platon, la philosophie n'a eu de cesse de s'expliquer sur ce qu'elle est, surtout afin de justifier son utilité.