hibou fr
Dans le premier des six livres des Contemplations, celui qu'il a intitulé Aurore, Victor Hugo introduit un long poème de 344 vers : Réponse à un acte d'accusation. C'est sans doute parce qu'il évoque son premier grand combat littéraire, celui du romantisme, que l'auteur place ce texte dans la partie du recueil consacrée au thème de la jeunesse, aurore de la vie. Le texte étudié couvre les vers 29 à 66 de ce long poème. Victor Hugo y développe une défense de son action personnelle et dresse un tableau de la langue et de la littérature française avant le romantisme. Le titre du poème le présente d'emblée comme un plaidoyer "pro domo", c'est à dire un plaidoyer de l'auteur en faveur de lui-même. Il suggère que le poète a été la cible d'attaques : lesquelles ? C'est la fin de l'extrait qui nous renseigne : "Alors, brigand, je vins" (v.32). Hugo s'applique ironiquement à lui-même le qualificatif injurieux que ses adversaires lui auraient attribué. Quel est donc son forfait ? : "Et sur les bataillons d'alexandrins carrés / Je fis souffler un vent révolutionnaire / Je mis un bonnet rouge au vieux dictionnaire". Donc, si l'on en croit Hugo, ses adversaires littéraires l'ont chargé d'un double crime : avoir révolutionné l'alexandrin, plus généralement les règles classiques de la poésie française; avoir révolutionné le "vieux dictionnaire" (le " bonnet rouge " est évidemment le bonnet phrygien, symbole de la révolution de 1789), c'est à dire le vocabulaire. Il fait allusion ici, certainement, à l'épisode de la bataille d'Hernani (1830). A 28 ans, Victor Hugo venait d'écrire un "drame" dont les représentations furent brutalement chahutées par les partisans de la tragédie classique, choqués par les audaces rythmiques de l'alexandrin utilisé dans les dialogues et par l'emploi d'un vocabulaire courant jugé trop familier . Le texte met en relief