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La jeune Zazie Lalochère est, dès le titre du roman, Zazie dans le métro, placée en position d’héroïne éponyme43. Le lecteur a donc envers elle les attentes habituelles que l’on a au moins envers le personnage central d’un récit, qui doit être rapidement défini par son nom, par son portrait physique, par son histoire personnelle ou sa biographie, et par sa psychologie. En effet, tous ces éléments sont traditionnellement employés par les romanciers pour accorder une épaisseur au personnage, et permettre au lecteur de lui prêter vie le temps de la lecture. La lecture du roman vient cependant perturber ces attentes… Zazie est-elle un « vrai » personnage de roman? Quelle est sa fonction dans le récit?
La jeune Zazie porte tout d’abord un prénom peu banal, création du romancier, accolé à un nom de famille, Lalochère, qui semble au contraire une caricature de nom de famille français.
Pour autant, Queneau n’a pas choisi le prénom au hasard: il se serait inspiré, comme il le révèle dans une interview qu’il a accordée à Marguerite
Duras dans le journal L’Express45, d’une égérie des zazous, surnommée la «Grande Zaza ». Les zazous étaient des jeunes gens qui s’affichaient, sous l’Occupation, comme anarchistes et apolitiques et se dressaient contre leurs parents pétainistes. Ils s’habillaient avec des surplus amé- ricains comme les blue-jeans et les chemises à carreaux, et appréciaient le jazz et le quartier de Saint-Germain-des-Prés, qui fut, avec les cafés de
Flore et des Deux Magots, le point de rencontre des zazous et des philosophes existentialistes. Vous aurez reconnu certains éléments récurrents associés au personnage:
– le « Singermindépré » que la fillette réclame dès le chapitre I
(« À Saint-Germain-des-Prés? demande Zazie qui déjà frétille »,
p. 16), puis recommande pour sa rentabilité, signe de son succès, à Turandot au chapitre II (« Mais à Singermindépré, (…) qu’est-ce qu’il se sucrerait », p. 28);