Inconscient et art
Qu’est-ce qu’un texte, qu’est-ce que le dire ? Une parole n’a qu’une permanence réduite et reste captive des circonstances où elle a été prononcée. L’écrit, lui, se libère de ces deux contraintes. Dès lors, il devient nécessairement disponible pour une lecture et une interprétation offertes à une liberté radicalement polysémique. Ce que l’auteur a voulu dire n’est pas plus figé que ce que le lecteur voudra lire. Il n’y a donc pas de sens unique.
La conséquence la plus importante est qu’il est mis définitivement fin à l’idéal cartésien , fichtéenn et pour une part aussi, husserlien, d’une transparence du sujet à lui-même. Que dire alors du sujet-comédien, dont l’essence s’alimente d’un détour par les signes et symboles ? L’être-au-monde d’un tel sujet peut il se donner immédiatement comme se montre l’être-là d’un locuteur dans une parole authentique et directe ? Se comprendre c’est se comprendre devant et face à un texte, c’est recevoir de lui les conditions d’un soi autre que le moi qui vient à la lecture : comment décrire alors l’essence du comédien ?
« L’art ne veut pas la représentation d’une chose belle, il veut la belle représentation d’une chose. » écrit Kant : l’art semble donc voué à la métamorphose, au changement, il est transformation de la réalité de l’être-au-monde qu’il dégage de critères à la fois ontiques et ontologiques.
Dès lors, le comédien doit-il, pour parvenir à émouvoir les spectateurs de la pièce qu’il joue, éprouver – se situer dès lors dans sa vérité – ou simuler parfaitement ce que ressentirait son personnage – le placer alors dans l’illusion créée par le Dasein- ? Il semblerait qu’être comédien ne se résume ni à l’un ni à l’autre : éprouver la liberté du « devenir autre » ne peut se faire sans prendre aucune distance à l’égard du personnage incarné, de même exagérer son jeu est tout aussi peu crédible, voire ridicule. Le pouvoir du comédien est , il va sans dire, la