Inegalites
Il y a 3 semaines, nous avons vu des manifestants s’introduire dans les bâtiments de Sciences-Po pour protester contre l’inégalité des chances dans l’enseignement supérieur, faisant de Sciences-Po le symbole de la reproduction sociale. D’un côté on pourrait se dire que leur revendications ne sont pas légitimes, puisque si nous sommes ici, c’est parce que nous sommes passés par un processus de sélection, auquel ils auraient pu également se soumettre, et que personne ne les a obligés à aller en fac (l’inégalité dont nous bénéficions serait donc juste, moralement acceptable). Mais d’un autre côté, on peut se demander si on mérite vraiment d’être ici, dans le sens où c’est en grande partie grâce à notre environnement familial et social que nous nous avons réussi notre parcours dans l’éducation, et peut-être qu’avec le même capital, ces étudiants seraient arrivés à la même place que nous (cette inégalité serait donc injuste). Cet exemple nous donne un aperçu du problème éthique et moral que pose la question de la justice, face aux inégalités. On a généralement tendance à être hostiles aux inégalités, pourtant certaines inégalités nous paraissent plus justifiables que d’autres. Est-il alors possible de parler de « justes inégalités » ?
« Le juste politique c'est celui qui règne entre des hommes (…) qui sont libres et égaux, soit d'une égalité proportionnelle, soit d'une égalité arithmétique. En sorte que pour ceux chez qui ces conditions ne sont pas réalisées, il n'existe pas de justice politique réglant leurs rapports mutuels. » Voilà ce qu’écrit Aristote dans le chapitre 10 du Livre V d’Éthique à Nicomaque. Autrement dit, il fait de l’égalité le principe fondamental de la justice. Donc a priori, l’idée de « justes inégalités » relève d’une contradiction dans les termes. Mais Aristote conçoit l’égalité de deux manières : il y a une égalité arithmétique, qui veut que chacun possède exactement les mêmes choses en mêmes quantités, et une égalité