Denis Diderot, très célèbre pour sa participation à la rédaction de l'Encyclopédie, laissa également son empreinte dans de nombreux genres littéraires : du théâtre où il posa les bases du drame bourgeois à la critique, un domaine dans lequel il innova à travers ses Salons. Mais l'écrivain philosophe révolutionna aussi le roman avec Jacques le Fataliste et son maître qui narre les aventures et les conversations de deux cavaliers, Jacques et son maître, alors que les deux hommes cheminent vers une destination inconnue. De par son appartenance au mouvement des lumières, Diderot nous donne à voir une critique virulente du déterminisme tout au long du récit. L'incipit même du roman nous propose un avant goût d'une oeuvre révolutionnaire. On peut alors se demander en quoi l'auteur renouvelle en profondeur les codes du genre romanesque dès l'incipit de Jacques le Fataliste et son maître. Nous étudierons dans un premier temps la forme originale que prend cet incipit, puis nous nous pencherons sur la critique du fatalisme, déjà omniprésente avec la mise en place d'un débat sur la liberté de l'individu.

C'est en reniant tous les codes de l'incipit romanesque que Diderot choisit d'ouvrir son récit de Jacques le Fataliste et son maître. Ainsi, non seulement l'auteur anticipe les questions que se pose son lecteur, mais il y répond dès les premières lignes, et instaure ainsi une relation originale avec le narrataire. En effet, ce commencement de roman propose une transformation des éléments traditionnels de l'incipit. Si ces derniers permettent communément d'introduire une histoire dans un contexte en présentant le cadre spatio-temporel et en donnant des informations de base comme le lieu, l'année, le temps et les comportements des personnages afin que le lecteur dispose de suffisamment d'éléments pour se plonger dans l'intrigue, l'incipit de Jacques le Fataliste et son maître se révèle déroutant. Effectivement, le narrateur ne laisse aucune indication de lieu et