Joseph shumpeter
Par Denis Clerc Schumpeter ne croit pas à l'avenir du capitalisme. Mais, contrairement à Marx ou Keynes, il pense qu'il est essentiellement menacé par la disparition des entrepreneurs. Une analyse qui conserve tout son intérêt, même si sa conclusion ne s'est pas vérifiée. À la fin des années 30, alors que l'Europe résonne de bruits de bottes, que les nations démocratiques ne parviennent pas à se sortir de la grande crise dans laquelle elles sont engluées depuis une décennie, Joseph Schumpeter commence ce qui sera sa grande œuvre : Capitalisme, socialisme et démocratie (1). C'est dans ce livre que, à la question " le capitalisme peut-il survivre ? ", il répond sans nuances dans une phrase célèbre : " Non, je ne crois pas qu'il le puisse " (p. 93). Ce qui, à l'époque, n'était à vrai dire pas très original. Les marxistes de toute obédience étaient arrivés depuis longtemps à la même conclusion, résumée ainsi par Marx et Engels dès 1848 dans Le manifeste du Parti communiste : " Ce que la bourgeoisie produit avant tout, ce sont ses propres fossoyeurs. " L'ampleur de la crise était telle que bon nombre d'auteurs, bien que non marxistes, n'étaient pas loin de penser que le capitalisme était sur le point de disparaître si l'Etat ne s'en mêlait pas : Keynes était de ceux-là. Mais si Schumpeter ne croit pas à l'avenir du capitalisme, c'est pour de tout autres raisons que les contradictions internes du système ou ses difficultés à assurer le pleinemploi. Même s'il s'est manifestement trompé dans sa conclusion, son analyse demeure, aujourd'hui encore, pleine d'intérêt. Un hommage à la bourgeoisie entreprenante On ne rendra jamais assez hommage à la classe sociale qui a porté et développé le système capitaliste, estime Schumpeter. Car " la machine capitaliste " qu'elle a engendrée " constitue, en dernière analyse, un mécanisme de production en masse, donc nécessairement synonyme de production pour les masses ". Les riches